Visite à la Maison de la culture de Longueuil

Par Québec Archéo |  Dans Lieux | 
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Il existe, à Longueuil, un endroit inspirant où toutes les conversations sur la culture sont possibles. Un lieu d’ouverture, de découvertes et d’apprentissages. Respirant au rythme du site patrimonial du Vieux-Longueuil et se nourrissant du sol riche au sein duquel elle est confortablement installée, la Maison de la Culture de Longueuil a de quoi émouvoir. On y laisse les expériences culturelles s’entremêler pour qu’une nouvelle forme de médiation voie le jour. J’y suis allée pour découvrir sa programmation pédagogique en arts visuels et en archéologie, dans ses locaux de la rue Saint-Charles.

Il est dans l’ère du temps de mettre en place des fouilles archéologiques dans les quartiers patrimoniaux comme le Vieux-Longueuil. Ce genre d’initiative enchante les citoyens, qui peuvent découvrir les pratiques de ces scientifiques parfois méconnus, les produits des fouilles archéologiques effectuées sur leur territoire et les connaissances sur leur passé alors révélées. Plus que des séances d’informations, ces activités de médiation permettent de partager le patrimoine de la ville. Les archéologues montrent la richesse de l’histoire de la région : les premiers bâtiments qui y ont été érigées pour bâtir des avenirs solides, les arbres qui s’y sont enracinés pour grandir, lentement et longtemps, des fiertés d’avant, des drames oubliés, des corps fatigués. Mais la terre garde aussi des secrets! Pour Stéphanie Briaud, archéologue-historienne de formation et conseillère en développement culturel au Bureau de la culture de Longueuil, les sols n’ont pas fini de nous en apprendre. Bien que le parc archéologique de la Baronnie n’ait pas connu d’interventions archéologiques depuis 2016, les résultats des travaux effectués sur les sites du Vieux-Longueuil sont encore bien vivants dans l’offre pédagogique de la ville.

Dans une initiative rafraîchissante et unique au Québec, la Maison de la culture de Longueuil a choisi de faire dialoguer l’archéologie et les pratiques en arts visuels. Ce mariage entre art et science donne lieu à des activités pédagogiques empreintes d’une sensibilité fédératrice pour la petite équipe. Au centre de leurs initiatives se trouve une volonté de démocratiser les différentes formes que peut prendre la culture. Depuis 2012, la Maison de la culture invite donc ses voisins à découvrir le travail d’artistes professionnels en compagnie de médiateurs en arts visuels, en plus d’événements créatifs d’archéologie où des spécialistes sont rassemblés pour échanger sur les différents aspects de leurs recherches.

Les différents forfaits proposés par la Maison de la culture débutent par une visite des salles d’exposition. C’est par l’art visuel que l’expérience culturelle démarre, avant de se diriger vers un atelier d’arts plastiques, une activité d’archéologie et finalement, la manipulation de reproductions d’artéfacts. Ce qui distingue la programmation développée par la Maison de la culture, c’est la capacité d’adapter la médiation pour différents groupes d’âges. L’équipe du Bureau de la culture est fière d’avoir développé l’expertise nécessaire pour que la médiation soit aussi efficace pour chacun de ses publics. La petite enfance a donc autant sa place que les personnages âgées, puisque la médiation se nourrit de l’expérience de chacun sans hiérarchiser leur bagage. Les médiateurs en archéologie se déplacent même dans les classes des écoles de Longueuil, pour faire découvrir les secrets de Charles Le Moyne au plus grand nombre.

La diversité des pratiques artistiques mises en lumière à Longueuil ne passe pas inaperçue. En septembre dernier, l’artiste Philippe Allard installait une immense œuvre d’art réalisée avec des contenants de lave-vitre non recyclables sur la façade du bâtiment patrimonial de la rue Saint-Charles. Pendant quelques semaines, les citoyens ont pu réagir, se questionner et développer leur regard critique sur cette installation qui a temporairement chamboulé leurs trajets quotidiens. Lors d’un événement-phare pour le quartier, le Lumifest, une projection vidéo a été projetée sur l’œuvre d’art. Cette installation est devenue une des attractions principales de l’événement! À l’intérieur des murs de l’édifice Marcel-Robidas, l’artiste s’est intéressé à l’automobile comme matériau artistique. Il a récupéré des pièces de voitures accidentées pour créer différentes œuvres qui font réfléchir sur la durée de vie du véhicule, mais surtout, celle de son passager. Une des œuvres, qui rassemble plusieurs ballons qui se gonflent et se dégonflent en symphonie lumineuse, prend un tout autre sens quand le médiateur nous explique que les ballons sont en fait des coussins gonflables de voitures accidentées, rendus inutilisables d’un point de vue sécuritaire. Ce sont donc les témoignages de réels accidents que le visiteur découvre.

Les traces de la vie humaine se documentent également dans l’archéologie, qui permet à celui qui regarde les artéfacts découverts de s’imaginer leur passé, leur fonction, leur provenance. L’atelier d’initiation traitait des différents objets qui peuvent être découverts sous la terre, dans des fouilles archéologiques comme celles effectuées dans le parc près de l’école de ceux qui participaient à l’atelier. Du haut de leurs cinq ans, les élèves se sont imaginé l’immensité de ce qui se trouvait sous leurs pieds, après avoir visionné la vidéo montrant le site de fouilles du parc archéologique de la Baronnie vu du ciel, en 2016. Le drone utilisé pour le tournage leur a permis d’observer les archéologues à l’œuvre, avec tous les outils qu’ils ont manipulés ensemble, sous le regard bienveillant de la médiatrice. Le petit atelier a pris un sens nouveau en explorant la présence autochtone sur le territoire; plusieurs enfants n’avaient jamais imaginé ces individus qui avaient habité Longueuil avant eux. Les trois objets utilisés de la collection éducative qui rappelaient ce qui avait été récupéré dans les fouilles avaient des utilités tout à fait inconnues des enfants. Détectives d’un jour et fiers de la mission qui leur avait été confiée, les élèves ont dû répondre à trois questions : qui utilisait l’objet qu’ils tenaient entre leurs mains, en quoi cet objet était-il fait et à quoi pouvait-il bien servir? Prenant parole devant leur groupe, les enfants ont expliqué au meilleur de leurs connaissances l’origine et l’utilité des objets qu’ils avaient dûment analysés. Au terme de cette journée d’activité, les 19 détectives ont rapporté deux bricolages à la maison:  l’un étant conçu de matériaux recyclés, en hommage à Philippe Allard et l’autre, rappelant les capteurs de rêves inspirés de la légende autochtone. Fiers, ils ont quitté l’édifice Marcel-Robidas les yeux mouillés et le sourire aux lèvres.

En mettant sur pied le Pôle histoire et patrimoine, la Ville de Longueuil encourage la concertation entre les organismes qui œuvrent à protéger et diffuser les savoirs patrimoniaux de leur région. De ces collaborations sont nées des actions de médiation patrimoniale pour les étudiants du secondaire (par le Théâtre du 450 et la Société historique et culturelle du Marigot), l’apparition de fresques magnifiques sur l’ensemble du territoire de Longueuil et une programmation riche et étendue sur tout le territoire longueuillois pour le Mois de l’Archéo. Tous ces projets font de Longueuil un milieu de vie riche, qui reconnaît l’importance de parler d’histoire tout en faisant briller les initiatives en arts visuels, art urbain et théâtre.

Le travail de la Maison de la culture est grand. Il est courageux de vouloir intéresser les jeunes à l’histoire de leur quartier, périlleux d’allier art contemporain à archéologie mais surtout, noble de vouloir que la fierté se propage. La journée que j’y ai passée m’a fait connaître des employés fiers d’offrir des expériences culturelles à un public curieux et impatient de transmettre ses connaissances nouvelles à ses parents, après la visite.  

Pour plus d'informations: longueuil.quebec/fr/maison-de-la-culture

Photo: Simon Laroche
Texte: Valérie Dezelak