Le Musée de l’Amérique francophone présente l’exposition La colonie retrouvée, qui fait la lumière sur une version jusqu’ici méconnue de notre histoire. Parcourez les milliers d’artéfacts qui témoignent de la présence de colons européens au Cap Rouge, fruit du travail intensif des archéologues.
On apprend sur les bancs d’école que Jacques Cartier fait l'expérience du territoire du Canada au cours de deux grands voyages. Après avoir passé l’hiver 1535-36 passe en sol québécois, il rentre en France, accompagné de ses multiples récits de voyage, des cargaisons de ce qu’il croit être de l’or et des diamants, en plus d’un témoin d’exception de ses récits en la personne de Donnaconna, Chef Iroquoien. De l’autre côté de l’Atlantique, c’est le récit du Chef qui convainc François 1er de financer un troisième voyage en Amérique, confié cette fois à un certain Jean-François de La Rocque de Roberval. Ainsi, en 1541, Roberval quitte la France avec une centaine de colons, dans le but de s’établir au Nouveau Monde. C’est ainsi que la toute première colonie française s’établit au cap Rouge, plus de 60 ans avant Samuel de Champlain.
Toutefois, la nouvelle colonie de Roberval ne jouit pas d’un grand avenir. En effet, deux ans après son arrivée, les colons épuisés, affaiblis et à bout de ressources rentrent en France. Leur village, établi sur le site Charlesbourg-Roberval, nommé par Jacques Cartier, est incendié avant leur départ.
Une société révélée
En 2005, un tesson de faïence italienne datant de la Renaissance est découvert sur le promontoire du cap Rouge. La Commission de la capitale nationale du Québec met en place un projet de fouilles archéologiques d’envergure sur le Site archéologique Cartier-Roberval. Au total, ce sont plus de 6000 artefacts qui ont été mis au jour par les archéologues. Après trois saisons de fouilles intensives et six ans de recherches menées par des experts issus de vingt disciplines scientifiques, le voyage des explorateurs Jacques Cartier et Jean-François de La Rocque de Roberval refait surface.
En pleine forêt, une petite société se dévoile aux archéologues. Nobles, roturiers, militaires, gens de métier et prisonniers ont évolué sur le territoire, pendant plusieurs mois. Les objets de leur quotidien maintenant mis au jour, c’est une version bien différente de l’Histoire qu’ils nous racontent! Tant d’artéfacts ont été témoins de la vie de ces premiers colons : tessons de verre, manches d’ustensiles, boutons plaqués d’argent, fragments d’une cotte de maille, pion de jeux de dames, notamment. Des objets et des restes d'aliments de luxe laissent supposer qu'un secteur était réservé à l'élite. La présence de poterie iroquoienne et de restes de plantes autochtones attestent d'échanges entre Français et Amérindiens.
Peu perturbé et situé en milieu naturel, le site archéologique Cartier-Roberval n’a pas fini de révéler ses secrets. Il conserve un potentiel de recherche substantiel, en plus d'offrir des occasions d'études spécialisées novatrices, notamment en sciences naturelles.
Réécrire l’histoire, pour mieux la raconter
Tant de découvertes ont eu pour effet de remettre en question les versions plus traditionnelles de l’histoire. Grâce aux artéfacts exhumés par les archéologues, Roberval et Cartier nous racontent aujourd’hui un pan méconnu de leur établissement en Amérique.
Afin de partager ces découvertes et d’échanger sur les nouvelles hypothèses que stimulent les résultats des fouilles, la Commission a édifié le mur mémoire Cartier-Roberval, commémorant la riche histoire du lieu. Dans l’ouvrage La Rumeur dorée, Roberval et l’Amérique (Éditions La Presse), l’historien Bernard Allaire raconte l’histoire de l’explorateur important et méconnu qu’est Jean-François de La Rocque de Roberval. Conjointement à la sortie du livre, l’exposition consacrée à la première France d'Amérique, La colonie retrouvée, se tient au Musée de l'Amérique francophone de Québec. Cette dernière est présentée dans sa forme actuelle jusqu'au 29 septembre 2019.